Communiqué du 10.11.04 : Politique de l’eau en Vendée

Politique de l’eau en Vendée : quels choix pour demain ?

Le Conseil Syndical de VENDEE EAU vient de décider de la construction d’un nouveau barrage sur l’Auzance pour garantir la fourniture d’eau potable au département dans les prochaines années. L’eau potable consommée en Vendée provient déjà pour une part de 90 % de l’eau superficielle contre 40 % seulement en moyenne en France, et l’on voudrait encore l’accroître.

La Vendée n’est pas le Sahel

Il n’y manque pas d’eau comme on veut nous le faire accroire. Par exemple, le volume d’eau souterraine dans le socle granitique de La Roche-sur-Yon est estimé, selon le B.R.G.M., à 600 Millions de m3 (Mm3). Même si nous savons que ce volume n’est que partiellement mobilisable et qu’il est plus difficilement accessible que pour les eaux souterraines sédimentaires du Sud-Vendée, pourquoi n’y aurait-il que 3,6 Mm 3 d’exploitables ? De plus, ne sont pas prises en compte les deux autres zones du département potentiellement favorables.
Par ailleurs, pourquoi ne pas envisager de reconsidérer l’exploitation de ces nappes sud-vendéennes en engageant un ambitieux programme de reconquête de leur qualité : en 2003, plus de 23 Mm3 de ces eaux souterraines ont été consommés par l’irrigation estivale au détriment d’une part de l’eau potable potentielle et d’autre part du soutien du Marais poitevin qui, tous les étés, se vide dans ses nappes surexploitées.

La politique du tout barrage décidée dans les années 1950 pour alimenter en eau la Vendée entraîne deux inconvénients majeurs : un déséquilibre écologique sur les milieux naturels aquatiques et un coût élevé payé par les petits usagers de l’eau comme le montre le tableau ci-après.

Charente maritime Deux-Sèvres Maine-et-Loire Loire-Atlantique Vendée
Pourcentage en eau superficielle 33% 36 % 38 % 58,4 % 90 %
Prix du m3 en eau potable HT 1,29 1,41 1,43 1,51 1,90

De plus, le volume d’eau des retenues sur les rivières doit être ajusté au printemps au regard de deux besoins contradictoires : servir de tampon en cas de crues et présenter un niveau maximum avant la saison estivale.
Les eaux souterraines, quant à elles, n’ont pas ces inconvénients, ne subissent pas de pertes par évaporation et, quand elles sont protégées, elles ne nécessitent pas de traitement coûteux car, filtrées par le sol, elles sont de bien meilleure qualité que les eaux de surface.

Des alternatives existent

Les besoins en eau de la Vendée ont augmenté ces dix dernières années de 5 Mm3 . Il s’agit dès lors de prévoir une augmentation équivalente à l’horizon 2015, et aussi des réserves suffisantes pour faire face à une demande supplémentaire en cas de déficit pluviométrique en été. L’accroissement de ces besoins peut être satisfait par au moins quatre types de solutions :

1 – En priorité

  • le développement de la production d’eau souterraine qui peut atteindre plus de 10 Mm3. Il doit être accompagné de politiques de protection plus volontaristes : périmètres de protection et généralisation des opérations “Bassins Versants” afin de maîtriser la pollution diffuse.

2 – En second lieu

  • l’utilisation d’eau de surface rend l’exploitation plus coûteuse mais aussi moins sûre. C’est pourquoi la sécurisation de la production pourrait être assurée par :
    • l’alimentation du Nord du département par l’eau des nappes alluviales en provenance du lit de la Loire ( une canalisation existe déjà ) ;
    • l’utilisation des retenues de certains barrages, comme celui de Mervent dont la liaison avec l’Ouest du département reste à réaliser ;
    • la mise en service de réserves d’eau dans les carrières désaffectées à l’instar de l’eau stockée dans la carrière des Coux à La Roche-sur-Yon qui va pouvoir suppléer de 1 Mm3 le barrage du Moulin Papon. Pourquoi cette proposition n’a-t-elle pas été chiffrée dans le rapport ?

La solution proposée par le Conseil Général de dessalement de l’eau de mer, à l’instar de ce qui est fait au Moyen-Orient, paraît être du domaine du gadget dont on n’a mesuré ni le coût d’installation ni celui du fonctionnement incluant le traitement des déchets générés. A l’extrême rigueur, cette alternative ne serait envisageable que dans le cas particulier de l’Ile d’Yeu, éloignée du continent. Dans une perspective de développement durable, sa faisabilité doit alors être couplée avec un programme d’énergie renouvelable susceptible de rendre le projet autonome.

Mais les besoins vont-ils continuer à augmenter ?

On pourrait aussi se poser la question. La consommation moyenne des Français est de 170 l par jour, celle des Américains de 700 l, nous dit-on, tandis que des millions d’Africains doivent se contenter de 40 l. Certes l’usager doit apprendre à ne pas gaspiller une ressource qui se raréfie en réparant les fuites de son installation et en ne laissant pas couler inconsidérément les robinets. Le distributeur aussi grâce à un meilleur entretien du réseau en réparant les fuites le plus tôt possible et en évitant les gâchis provoqués par les ruptures de canalisation lors des travaux sur la voie publique. Mais il faut aussi considérer les besoins au niveau de chaque secteur socio-économique : industrie, agriculture et ménages.

Pour alimenter les milliers d’hectares de maïs, plante tropicale qui a des besoins hydriques importants pendant la période sèche, les agriculteurs puisent allègrement dans toutes les ressources accessibles : forages dans les nappes souterraines de la plaine, pompage dans les cours d’eau, ou interception de ruissellement par des retenues collinaires dans le bocage. 4,7 Mm3 d’eau en provenance des barrages sont prélevés aujourd’hui pour l’irrigation des cultures. Et il faut encore ajouter à cela les volumes affectés au soutien d’étiage pour pallier l’épuisement accéléré des nappes en Sud-Vendée. L’Agriculture consomme à elle seule autant d’eau que les autres secteurs du département.

Or, cette eau d’irrigation disparaît à 85 % en évaporation et dans l’alimentation des céréales, alors que celle utilisée par l’industrie et la population retourne, pour la plus grande partie et après traitement, à la rivière.

Une gestion de l’eau inéquitable

La Politique Agricole Commune (PAC) et les priorités opérées pour son application au plan national favorisent ce type de culture en les subventionnant à outrance ; alors même qu’elles contribuent largement à dégrader les ressources en eau potable par les excès d’amendement en azote et en produits phytosanitaires qu’elles utilisent, pollution dont le coût des traitements retombe sur le dos des petits usagers de l’eau. Il est donc indispensable d’orienter les aides agricoles avec la volonté de préserver la nature et de partager plus équitablement la ressource en eau.

La Chambre d’Agriculture réclame aussi la construction de nouveaux barrages pour satisfaire les besoins de l’irrigation de préférence évidemment aux captages d’eau pour lesquels la loi impose des contraintes aux agriculteurs en vue de protéger la ressource contre la pollution diffuse. En outre, la profession agricole préconise d’augmenter encore les réserves en eau superficielle sur le secteur de la plaine sud-vendéenne par des retenues bâchées fort coûteuses en argent public.

Conclusion

Appuyée par une sous-estimation des moyens d’approvisionnement, en particulier des ressources souterraines et sans remise en cause de la surexploitation due aux pratiques de l’irrigation intensive, la construction d’une retenue préconisée par la société Hydratec semble apparaître aujourd’hui comme un impératif incontournable. Ce n’était pas le cas dans l’étude réalisée sur le même sujet cinq ans auparavant par le cabinet S.C.E. Y-a-t-il une mauvaise et une bonne expertise, la bonne étant celle qui va dans le sens voulu par les décideurs ? Tout se passe en effet comme si les choix proposés par le Conseil Général tendaient à privilégier l’intérêt de deux secteurs économiques, celui de l’Agriculture intensive et aussi celui des multinationales qui construisent ces barrages et entretiennent les usines de traitement de l’eau, et ceci aux dépens de l’intérêt général de la population.

C’est cette politique de l’eau que nos associations dénoncent

- La facture d’eau est imbuvable
- Coordination pour la défense du Marais Poitevin
- E.P.L.U.V. (association des usagers de la distribution de l’eau potable de Luçon)

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