Par deux décisions rendues le 31 décembre 2009, le tribunal administratif de Poitiers a annulé deux arrêtés du préfet de la Charente-Maritime autorisant la réalisation de deux réserves de substitution à Benon et Ferrières (environ 300 000 m3, dans la Plaine d’Aunis) et de cinq autres réserves dans le bassin du Mignon (environ 1,5 Mm3).
Après l’annulation par le tribunal administratif de Nantes, en novembre 2008, du projet de dix retenues de substitution dans le bassin des Autises, le tribunal administratif de Poitiers vient donc de conclure dans le même sens pour deux autres dossiers, faisant droit aux requêtes des associations Nature Environnement 17 et AIE 17.
Dans le bassin des Autises, les maîtres d’ouvrage et l’administration ont été contraints de reconsidérer leur projet, tentant ainsi de le rendre plus conforme à la réglementation. Il en sera de même en Charente-Maritime, à moins que les promoteurs de ces retenues ne s’orientent vers une aventureuse procédure d’appel.
Encore une fois, nous assistons au résultat que donne une déplorable façon d’instruire les dossiers, héritée de plusieurs décennies de mauvaises pratiques. La gestion de l’eau, en particulier la gestion des prélèvements estivaux, a été trop longtemps confisquée par les partisans des conceptions les plus intensives de la profession agricole. Il s’en est suivi des réflexes d’action en « terrain conquis », en considérant les projets comme acquis a priori ; en bâclant leur conception et en faisant des services instructeurs de l’administration de simples chambres d’enregistrement. Avec un chantage à « l’économie » s’exerçant à plus haut niveau comme seule réponse aux difficultés rencontrées et aux interrogations émises..
L’ensemble des usagers de la ressource en eau, pourtant reconnue comme un bien commun, est ignoré, voire même méprisé comme sur le bassin vendéen des Autises, où le nouvel arrêté de régularisation, retouché dans sa forme, reproduit à l’identique les conditions techniques d’exploitation des ouvrages et les méthodes de gouvernance, pourtant critiquées par tous.
Ces jugements des tribunaux devraient être l’occasion de permettre de ramener chacun à une réalité plus démocratique.
Ceci d’autant plus que la Coordination pour la Défense du Marais Poitevin n’a jamais fermé la porte au dialogue. Mais il faut que celui-ci soit franc et loyal. En effet, nous voyons bien qu’après tant d’années de laisser-faire, l’effort à fournir est considérable. On sait maintenant qu’une réduction globale des 2/3, parfois des ¾, des prélèvements est impérative : toute autre évaluation minimisant la situation ne saurait relever que d’un objectif intermédiaire.
Ainsi, compte tenu de son coût collectif et de ses impacts environnementaux non négligeables, la solution des retenues de substitution n’est envisageable que dans un contexte où les solutions alternatives les plus soutenables sont envisagées et mises en œuvre en priorité. Cela passe, en particulier, par un vrai engagement, dénué d’arrière-pensées, dans des pratiques agricoles différentes, plus respectueuses de la ressource en eau, et ceci pas seulement dans les bassins d’alimentation des captages pour l’eau potable.
Est-ce demain la veille ?