Communiqué du 12.02.98 : Réexaminer en profondeur la situation du Marais poitevin dans son ensemble

La Coordination pour la défense du Marais poitevin se réjouit de voir le Ministre de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement se saisir enfin du dossier du Marais poitevin, si mal traité par son prédécesseur.

Le prétendu label « Grand site naturel » n’était en effet qu’un faux semblant de plus, destiné à masquer l’échec des pouvoirs locaux et le manque de sincérité de leurs proclamations soi-disant « protectrices ».

La supercherie médiatique sur laquelle repose le « plan d’actions » concocté en décembre 1996 par Jean-Pierre Raffarin et Corinne Lepage est aujourd’hui démasquée. Il convient désormais d’aller plus loin et de réexaminer en profondeur la situation du Marais Poitevin dans son ensemble, sans céder à la vieille logique de l’émiettement du territoire et des traitements séparés, qui perpétue, voire renforce les effets néfastes des divisions politico-administratives.

En évoquant la protection réglementaire de la Venise Verte, le ministre fait allusion au projet actuel d’extension du site classé, qui devrait effectivement empêcher la délivrance d’un permis de construire pour des réalisations telles qu’une ligne à haute-tension. Il n’en reste pas moins que ce classement de site ne concernera qu’une petite partie du Marais Poitevin. Et surtout, il s’agit d’une mesure tout à fait impropre à la gestion active du milieu. On ne peut donc pas considérer ce classement comme une réponse susceptible d’enrayer le développement des pratiques agricoles destructrices qui atteignent aujourd’hui cette zone.

La Coordination pour la défense du Marais poitevin rappelle ses propositions récemment présentées, qui identifient les principaux axes de travail et les décisions concrètes et urgentes qui permettraient d’apporter des réponses adéquates aux enjeux actuels du Marais Poitevin :

Se fixer un objectif prioritaire de préservation et de restauration, et redonner à la population la fierté d’habiter et de vivre dans un pays original, riche d’histoire et de potentialités, dans le respect de ses caractéristiques essentielles :

  • Notification dans les meilleurs délais de l’ensemble Marais poitevin et Baie de l’Aiguillon comme site Ramsar, avec inscription au Registre de Montreux (en application de la Convention internationale sur les zones humides).
    « Le Registre de Montreux est le principal instrument de la Convention permettant de mettre en évidence les sites où un changement défavorable s’est produit, est en train ou susceptible de se produire dans les caractéristiques écologiques et où des mesures de conservation prioritaires sont donc nécessaires. Le Registre est géré dans le cadre de la Banque de données Ramsar et mis à jour en permanence. »
    [Principes opérationnels du Registre de Montreux – Résolution VI.1, Brisbane 1996, Annexe, 3]

Se donner tous les moyens de protéger les éléments du patrimoine maraîchin qui subsistent :

  • réalisation de l’objectif « zéro perte nette » :
  • désignation comme Zones de Protection Spéciale (ZPS) de la totalité des prairies naturelles restantes, accompagnée d’un contenu protecteur de type réglementaire interdisant la destruction et le labour (le plus souvent : arrêté préfectoral de biotope) ;
  • correction des aberrations des délimitations précédentes (ZPS, Loi Littoral).

Compte tenu du contexte actuel, des dispositions à caractère réglementaire doivent impérativement venir en appui des opérations agro-environnementales, qui s’avèrent insuffisantes pour enrayer à elles seules la dégradation (il s’agit en effet d’opérations facultatives, temporaires, non compétitives par rapport à la mise en culture).

Cesser sans ambiguïté de soutenir toutes les pratiques agricoles inadaptées :

L’eau représente incontestablement l’élément clé, et les pratiques agricoles peuvent et doivent s’apprécier en fonction de leurs effets sur les milieux aquatiques et sur la ressource.

  • Renforcement des mesures de préservation de la ressource en eau :
    Au niveau du grand bassin versant
    • mesures de limitation de l’irrigation et de protection des nappes aquifères
    • arrêt des créations/régularisations des points de prélèvement
    • encadrement en durée de la saison d’irrigation
    • renforcement des protocoles de gestion avec prise en compte des indicateurs d’affaiblissement de la ressource
    • refus des expédients de type barrages et retenues collinaires relevant de la simple fuite en avant
    • mise en place de soutiens aux cultures les plus économes de la ressource
    • mesures de réhabilitation/protection des microsystèmes souterrains : favoriser l’infiltration, limiter le ruissellement) ;
  • Mise en place prioritaire de mesures de reconquête et de renaturation des couloirs d’inondation (lit mineur et majeur) et axes hydrauliques.

Soutenir au contraire en priorité les pratiques agricoles compatibles avec la préservation de l’environnement et du patrimoine maraîchin :

L’indispensable rééquilibrage des aides aux productions agricoles doit prendre en compte leurs effets sur l’environnement ; favoriser l’élevage extensif dans le marais et les cultures économes en eau à l’échelle du bassin versant.

En finir sans ambiguïté avec les projets d’aménagement antinomiques avec la préservation du patrimoine naturel du marais :

  • Réévaluation des projets d’infrastructures susceptibles d’affecter les zones humides :
    • Projet d’autoroute A831 (Fontenay-le-Comte/Rochefort)
      • Retrait de l’accord de la Direction de la Nature et des Paysages en date du 14 mars 1997 ;
      • Lancement d’une véritable concertation, conforme à la réglementation, pour permettre l’étude d’alternatives à partir du réseau routier existant.
    • Liaison Sainte-Hermine/La Rochelle (par Moreilles et le Pont du Brault)
      • Fermeture des  » fenêtres  » laissées disponibles par les Z.P.S. actuelles.
    • « Route bleue » du littoral vendéen
      • Protection des espaces de haute valeur biologique actuellement « oubliés » au titre des ZPS et de la Loi Littoral.

La nomination par le Gouvernement d’un chargé de mission de haut niveau hiérarchique, afin d’assurer, au plus près du terrain, le suivi et la réalisation des mesures nécessaires à la sauvegarde et à la réhabilitation du Marais Poitevin, est indispensable pour couronner le dispositif volontariste dont nous demandons la mise en place, et pour en garantir la concrétisation.

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