Schémas d’aménagement et de gestion des eaux du Marais Poitevin : un parcours du combattant

Schémas d’aménagement et de gestion des eaux du Marais Poitevin :
un parcours du combattant.

Les trois Schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) du Marais poitevin ont été validés par le Comité de Bassin… sous réserve de nouveaux ajustements.

En dépit des enjeux partagés sur l’ensemble de ce territoire, tant sur le plan de la gestion quantitative que sur celui de la qualité des eaux, et malgré l’exutoire commun des différents cours d’eau dans la baie de l’Aiguillon et dans le Pertuis Breton, la décision avait été prise en 1997 de scinder le bassin versant du Marais Poitevin en trois SAGE, pour satisfaire des revendications territoriales essentiellement vendéennes. Dans sa sagesse, le Comité de Bassin Loire-Bretagne a donc imposé que ces trois SAGE, documents de planification de la gestion des eaux arrêtés pour une durée de six ans, soient élaborés dans une démarche coordonnée. C’est ainsi que les services de l’État ont dû mettre en place une commission afin de garantir cette cohérence. Or, cette cohérence n’est toujours pas acquise…

Après plus de dix années de concertation…

Il a fallu plus de dix ans de procédures et de discussions aux différents acteurs de ce territoire, regroupés dans trois commissions locales de l’eau – CLE (1) – pour élaborer leurs schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Le 16 janvier 2008, le SAGE « Sèvre Niortaise – Marais Poitevin » était adopté par sa CLE. Puis, en février 2008, ce fut le SAGE « Lay ». Mais l’adoption du SAGE « Vendée », alors aussi sur le point d’aboutir, fut retardée en raison d’une manifestation virulente des chambres d’agriculture et d’élus de la majorité du Conseil Général de la Vendée, manifestation qui empêcha la réunion de validation de se tenir. De fil en aiguille et après le renouvellement du collège des élus à la suite des élections municipales de mars 2008, cette coalition d’intérêts, ayant pris en main le bureau de la commission locale de l’eau, a réécrit certaines dispositions du projet de ce SAGE « Vendée », en s’écartant sensiblement, dans la définition de ses objectifs, de ceux du SAGE « Sèvre Niortaise – Marais Poitevin ». La manœuvre a aussi permis de retarder l’ensemble de la procédure de plus d’un an, puisque le texte issu de cette réécriture a été adopté par la CLE le 19 mars 2009.

Parallèlement, l’élaboration du Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux du bassin Loire-Bretagne avançait et aboutissait à son approbation à la fin de l’année 2009. Ce SDAGE, élaboré à une échelle plus large, impose dorénavant à ses déclinaisons locales que sont les SAGE les prescriptions minimales pour que d’ici 2015 près des deux tiers des eaux de Loire-Bretagne retrouvent un bon état écologique.

Le résultat de cet imbroglio de calendrier fait que le SAGE « Vendée » a été validé dans une version incompatible avec le SDAGE ; que le SAGE « Lay », d’emblée écrit sous la dictée scrupuleuse des intérêts agricoles, est lui aussi incompatible avec le SDAGE (avec cependant, l’excuse de l’antériorité). Au final, seul le SAGE « Sèvre Niortaise – Marais Poitevin » s’avère compatible avec les dispositions du SDAGE, qu’il avait anticipées, allant même au-delà de quelques-unes d’entre elles et se montrant ainsi plus favorable à une reconquête du bon état des eaux, notamment souterraines (2).

C’est à cette situation que le Comité de Bassin devait faire face, les services de l’État et la commission de coordination des trois SAGE lui proposant d’adopter l’ensemble de ces documents, sous réserve d’une mise en compatibilité des dispositions des SAGE « Lay » et « Vendée » avec le SDAGE.

Toujours animées par le souci de s’inscrire dans une dynamique constructive, les associations de protection de la nature et de l’environnement siégeant au Comité de Bassin, auxquelles se sont joints les représentants des associations de pêcheurs et de consommateurs, se sont déclarées favorables au SAGE « Sèvre Niortaise-Marais Poitevin » ; et leurs représentants se sont abstenus sur les deux autres, dont une ré-écriture compatible avec le SDAGE devra être soumise à nouveau à l’avis du Comité de Bassin.

… le « parcours du combattant » n’est pas achevé.

Encore une fois, le calendrier électoral actuel va venir perturber le processus d’avancement de la procédure : le collège des élus des CLE devra être modifié après les élections régionales de mars 2010, et plusieurs mois s’écouleront donc avant que les préfets ne puissent arrêter ces textes… Il est certain – cela a été pratiquement annoncé en séance ce 26 janvier –, que les représentants de l’agriculture intensive, qui a déjà pillé la ressource en eau du bassin et qui œuvre pour une gestion de l’eau à minima dans le Marais, utiliseront ce délai supplémentaire pour « en faire rabattre » au SAGE « Sèvre Niortaise-Marais Poitevin » jugé par eux « trop ambitieux ». Autrement dit, ils mettront tout en œuvre pour atteindre la cohérence par le bas, en minimisant les objectifs et les programmes de mesures…

C’est pourquoi nous appelons les décideurs, élus et administrations, investis d’une mission de défense de l’intérêt général, à ne pas céder aux habituels chantages. Il leur appartient de tenir bon la barre afin que le cap ne soit pas éternellement dévié. Il est en effet urgent que de nouvelles voies d’action puissent enfin être entrevues.


(1) La commission locale de l’eau (CLE) est l’organe politique de concertation qui assure la préparation et la mise en oeuvre du SAGE. Elle représente les divers acteurs du territoire, en 3 collèges : 1) le collège des représentants des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics locaux ; 2) le collège des usagers, des propriétaires fonciers, des organisations professionnelles et des associations concernées ; 3) le collège des représentants de l’Etat et de ses établissements publics.

(2) L’exception maraîchine : le SDAGE du bassin Loire-Bretagne affiche partout des objectifs de bon état quantitatif à atteindre en 2015 sauf pour les nappes aquifères alimentant le Marais poitevin ; alors qu’aucune contrainte technique ne peut justifier cette dérogation.

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