Communiqué du 08.08.03 : Relance du drainage dans le Marais poitevin

Relance du drainage dans le Marais poitevin : la Coordination pour la défense du Marais poitevin dénonce des procédures irrégulières et des dossiers bâclés

Plusieurs enquêtes publiques relatives à des demandes d’autorisation de drainage de parcelles agricoles dans le Marais poitevin ont été organisées récemment par les services préfectoraux de Vendée. La Coordination pour la défense du Marais poitevin a pris connaissance des rapports rendus par les commissaires enquêteurs. Tous donnent des avis favorables, l’un de ces avis étant cependant assorti de réserves.
Or, du fait de la similitude des différents dossiers, les deux « réserves » émises dans un des cas s’appliquent incontestablement aux autres.

  • La première de ces réserves porte sur les risques de pollution des eaux et de la Baie de l’Aiguillon, point sur lequel des opinions contradictoires s’opposent sans qu’il puisse être conclu à l’absence d’impacts négatifs liés à la réalisation de ces projets de drainage.
  • La seconde réserve renvoie à la méconnaissance de la nécessité d’une étude d’incidence au titre de la directive n° 92-43/CEE (Natura 2000). Les projets en cause sont en effet susceptibles d’affecter de manière défavorable le site Natura 2000 du Marais poitevin et ses composantes que sont les principaux canaux du marais desséché et la Baie de l’Aiguillon.

Cette situation soulève des difficultés de deux ordres

  • les réserves du commissaire enquêteur doivent impérativement pouvoir être levées, sans quoi son avis devrait être considéré comme défavorable ;
  • l’étude d’évaluation d’incidence prévue par la réglementation aurait dû faire partie intégrante des dossiers soumis à enquête publique ; or, aucune des pièces constituant ces dossiers ne peut prétendre répondre à cette obligation.

D’autre part, aucune évaluation n’a été conduite des effets de chacune de ces opérations de drainage « en conjugaison avec d’autres plans ou projets » comme le prévoit la directive précitée. Pourtant, il s’agit bien d’une série d’opérations similaires et conjointes, basées sur des dossiers d’enquête dont le contenu est très comparable, et qui ont d’ailleurs tous eu pour auteur le même bureau d’études.

Globalement, l’ensemble des enquêtes aujourd’hui achevées couvre une superficie totale de 171 hectares, dans lesquels est donc prévue la pose de drains enterrés. Par l’ajout de 4 nouvelles pompes de relevage, la capacité d’évacuation des eaux augmenterait de plus de 700 m3/heure ; le tout, doit-on rappeler, dans la périphérie immédiate de la Baie de l’Aiguillon, à laquelle ces opérations sont toutes directement connectées via les émissaires du marais desséché.

On ne peut que souligner la gravité des anomalies relevées dans cette série de dossiers, et s’inquiéter des conséquences très négatives qui pourraient en résulter, qui plus est dans le contexte extrêmement sensible du Marais poitevin.

De plus, la reconquête de la qualité des eaux est l’un des enjeux majeur des futurs SAGE (Loi sur l’eau du 3 janvier 1992) concernant le Marais poitevin, en particulier pour protéger les activités conchylicoles de la Baie de l’Aiguillon. Or, le drainage des parcelles agricoles a été identifié comme un facteur de risque en raison de sa contribution au transfert des pollutions, ce qui vient peser sur l’objectif d’amélioration qualitative.
Réaliser de tels projets alors que ces SAGE sont en cours d’élaboration, relèverait donc d’une logique du « fait accompli » tout à fait inacceptable. Les résultats de la première phase à peine achevée (l’état des lieux) en seraient faussés, pendant que les phases à venir s’en trouveraient encore plus fortement contraintes.

Répondant récemment à un parlementaire, Mme la Secrétaire d’Etat au développement durable insistait sur les effets de ce type d’opérations, effets d’ordre « quantitatif », mais aussi « qualitatif, tenant au transfert plus rapide des substances polluantes tels les nitrates et les produits phytosanitaires, sans oublier la suppression de zones humides dont l’intérêt environnemental n’est plus à démontrer. » Ce sont ces effets, concluait-elle, qui justifient que ces opérations soient soumises « à un régime d’autorisation préalable assortie d’une enquête publique permettant de s’assurer de l’adéquation du projet avec les intérêts environnementaux tout en informant le public » (Assemblée nationale – Mardi 27 mai 2003 – Question orale – J.O. AN (CR) n° 49).

Ces propos sont de bon sens ; encore faut-il que la procédure ne soit pas vidée, précisément, de tout son sens, et que l’administration ne se satisfasse pas de dossiers bâclés, ne respectant ni l’esprit ni même la lettre de la réglementation en vigueur. Il est scandaleux de prétendre faire valider, sous couvert d’enquête publique, un tel laxisme. Tenter de « légaliser » ainsi des pratiques et des procédures aussi peu conformes à l’intérêt général relève tout simplement d’un détournement d’une législation qui vise à assurer une « gestion équilibrée » de la ressource en eau et « la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides » (art. L. 211-1 du Code de l’environnement).

L’inquiétude née de ces enquêtes publiques est d’autant plus justifiée que les projets concernés ne sont sans doute que des « ballons d’essai », et que d’autres suivront prochainement. Arriver, par accumulation d’opérations individuelles, à 100% de drainage dans le marais desséché reste l’objectif de quelques acteurs locaux soucieux de « finir le travail » engagé dans les années 1980. C’est pourquoi la Coordination pour la défense du Marais poitevin a décidé de saisir les pouvoirs publics de cette affaire, en leur demandant de répondre à la série de questions qu’elle soulève.

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