Le Marais Poitevin, un espace en crise

Communiqués de presse de la Coordination pour la défense du Marais Poitevin


  19/12/2010

Ne laissons pas saboter le SAGE Sèvre Niortaise et Marais Poitevin !

 

Le jeudi 15 décembre vient de s'ajouter au cortège des journées noires qui marquent l'histoire récente du grand bassin versant de la Sèvre niortaise et du Marais poitevin.

Des représentants agricoles aveuglés par les intérêts des plus nantis d'entre eux, ont réussi à faire échouer l'adoption du Schéma de planification de la gestion des eaux du Marais et de son bassin versant, pourtant issu d'un long et laborieux compromis.

Comment comprendre que ce projet de SAGE puisse être remisé, alors que bien plus de la moitié des membres de la CLE (commission locale de l'eau) : 37 sur 59 présents ou représentés, s'est déterminée en sa faveur ? Comment admettre que tout le travail réalisé depuis 12 ans pour aboutir à ce compromis ne puisse être achevé ?

Certes, la réglementation exige une majorité des 2/3 : il a donc manqué 2 voix sur 59 !

Derrière ces chiffres, chacun voit bien le résultat – cette fois-ci obtenu de justesse – d'une tactique permanente de mise en échec, où l'on retrouve toujours les mêmes acteurs : les élus proches de la majorité du conseil général de la Vendée et les représentants majoritaires de la profession agricole. Ceux-là méprisent au plus haut point les attentes légitimes de la population, inquiète de la dégradation de la ressource en eau et des milieux aquatiques ; ils oublient au passage la solidarité qui devrait prévaloir, au vu des difficultés dans lesquelles sont plongés beaucoup d'exploitants, notamment des éleveurs, alors qu'au terme d'un ultime débat de plusieurs heures, des concessions significatives avaient été faites en faveur des plus fragilisés d'entre eux. Comme elles l'ont fait tout au long de ces longues années de discussions, les associations fédérées par la Coordination pour la défense du Marais Poitevin ont soutenu cette volonté de dialogue.

La situation ainsi créée affaiblit considérablement l'Etablissement Public pour la gestion de l'eau et de la biodiversité du Marais Poitevin, lequel se verrait ainsi privé, avant même son lancement, d'un outil majeur.

Nous sommes persuadés que quelques-uns des élus qui se sont laissés entraîner dans cette mésaventure, convaincus que le texte ‘passerait' quand même, ont de quoi regretter amèrement la situation qu'ils ont provoquée.

Nous en appelons donc instamment aux élus, dont certains travaillent depuis plus de 10 ans sur ce projet, pour que soit convoquée dès le début du mois de janvier une nouvelle réunion de la CLE – son règlement intérieur le permet – afin de réexaminer la situation et sortir de ce blocage.


19/10/2010

Gestion de l'eau du bassin versant du Marais poitevin :

il faut avancer maintenant !

 

Les commissions d'enquêtes publiques sur les projets des trois SAGE (schéma d'aménagement et de gestion des eaux) « Sèvre Niortaise - Marais poitevin, Vendée et Lay » ont rendu leur verdict. Après un dépouillement soigneux des dossiers, le recueil des avis et l'audition des maîtres d'ouvrages, leurs conclusions sont claires :

Les projets présentés des SAGE de la Vendée et du Lay sont inacceptables car incompatibles avec le SDAGE (schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux) [1] de Loire-Bretagne. De plus, s'agissant du SAGE Lay, il est remarquable que la commission d'enquête exige un renforcement juridique du texte afin que celui-ci ait une réelle portée et qu'il ne se contente pas de simples affichages.

Quant au SAGE Vendée, il est dommage, et curieux, que la commission d'enquête n'ait pas retenu notre questionnement pourtant essentiel sur les ambiguïtés de la répartition des volumes exportés dans les départements voisins par les barrages de Mervent, et bientôt libérés. A l'heure où les questions d'accès à l'eau potable sont à l'ordre du jour en Vendée, il serait inacceptable qu'une partie des volumes de ces ouvrages soit furtivement détournée vers l'irrigation agricole.

Le SAGE Sèvre niortaise - Marais poitevin, le plus ambitieux des trois et impliquant les départements de la Charente-maritime, des Deux-Sèvres, de la Vendée et quelques communes de la Vienne, reçoit par contre un satisfecit de la commission d'enquête. Celle-ci a fortement argumenté sur le fait qu'il est évident qu'un SAGE doit présenter des dispositions et règlements allant au-delà du SDAGE : sinon à quoi servirait-il ?

Ainsi, si les projets de SAGE du Lay et de la Vendée doivent être repris, celui de la Sèvre niortaise est le seul à pouvoir être adopté en l'état, au nettoyage près de quelques « virgules ».

La Coordination pour la défense du Marais Poitevin demande aux autorités préfectorales de valider le SAGE Sèvre niortaise - Marais poitevin dans les plus brefs délais, sans attendre la mise à niveau de ses voisins, et sans le dénaturer . Une décision contraire serait le signal indiscutable d'un manque de détermination pour orienter ce territoire vers une gestion de l'eau partagée et respectueuse des milieux.

L'Etablissement public d'Etat pour la gestion de l'eau et de la biodiversité du Marais poitevin, en cours de création, doit pouvoir s'appuyer sur un texte efficace ; faute de quoi il souffrira à son tour d'un lourd handicap dès sa naissance, répétant en cela une configuration hélas bien connue.

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[1] SDAGE : Planification de la gestion de l'eau à l'échelle du grand territoire Loire-Bretagne.

 


18/08/2010

 

La sécheresse : le révélateur des incohérences de la gestion de l'eau.

Communiqué de la Coordination pour la défense du Marais Poitevin et de la LPO - Délégation de la Vendée

 

Dès le début du mois de juin, le premier arrêté de restrictions des usages de l'eau était mis en œuvre dans le département de la Vendée, prouvant que l'administration préfectorale fait preuve de vigilance sur le sujet de la gestion estivale de la ressource en eau. Cet arrêté s'appliquait aux secteurs du nord-ouest du département et il était accompagné d'un communiqué invitant «  les vendéennes et vendéens, les entreprises et les collectivités territoriales à faire preuve de civisme et à ne pas gaspiller l'eau …  ». Puis, semaine après semaine, les restrictions ont été géographiquement étendues et durcies jusqu'à afficher rapidement (le 1er juillet) les premières «  interdictions totales de prélèvements  ».

Le 21 juillet, la limitation des usages non-prioritaires de l'eau potable (arrosage, …) était déclenchée ; alors que l'interdiction des prélèvements dans l'ensemble des cours d'eau – aux quelques exceptions près décrites dans ces arrêtés – était maintenue.

Simultanément, les assèchements des rivières se généralisaient exagérément, assecs confirmés par les relevés de l'ONEMA. Les bordures du Marais poitevin recommençaient à s'assécher aussi, comme pratiquement tous les ans depuis plus de 20 ans ; alors que les sources que les anciens avaient connues permanentes se tarissaient et que les voies d'eau s'écoulaient à l'envers : de l'aval vers l'amont.

Temporairement placés dans l'impossibilité de répondre aux missions pour laquelle la Réserve naturelle Michel Brosselin de Saint-Denis-du-Payré a été créée, ses nouveaux gestionnaires ont refusé toute réalimentation par pompage, et par voie de conséquence ils ont décidé de fermer la Réserve au public.

Inégalités de traitement

Et pourtant, chacun observait autour de lui, notamment en sud-Vendée, les irrigations agricoles se maintenir, parfois sans limitation apparente. Les témoignages offusqués remontent vers les associations, y compris dans le secteur dit des Autises pourtant supposé être protégé par un coûteux programme de retenues de substitution maintenant réalisé à plus des 2/3.

En réalité, et à quelques exceptions près, les interdictions ne s'appliquent qu'aux cours d'eau. Les nappes d'eau souterraines du sud-Vendée, où se concentre l'essentiel des volumes prélevés pour l'irrigation agricole, ne font l'objet à ce jour d'aucune mesure d'interdiction des prélèvements. Ces nappes ne sont affectées que par des restrictions partielles, dans un premier temps particulièrement peu efficaces compte tenu du mode de gestion particulier de ces zones. Ces restrictions s'expriment en % d'un quota géré à la quinzaine, et dont le volume total est supérieur à la consommation réelle moyenne. Les restrictions de premier niveau sont d'un ordre de grandeur correspondant à l'écart entre le volume attribué et celui réellement consommé. Un exploitant un tant soit peu prévoyant est donc peu ou pas pénalisé par ce premier niveau de restriction somme toute assez théorique.

Or, il existe une connexion directe entre les nappes phréatiques, les marais, les rivières et leurs sources. C'est pourquoi nous demandons depuis longtemps qu'à l'instar de ce qui existe sur le reste du grand bassin versant du Marais poitevin, les cours d'eau, les marais et les nappes soient gérées simultanément et en cohérence.

Conclusion

La nécessaire préoccupation concernant l'eau potable ne doit pas masquer qu'en cette mi-août, les rivières ont été vidées une fois de plus, et que les marais littoraux se sont à nouveau asséchés au point que leur biodiversité se banalise et qu'ils perdent leur fonctionnalité si essentielle. Cet état, qui ne s'explique pas uniquement par des considérations météorologiques, est dorénavant irréversible jusqu'au prochain hiver.

Le « hold-up » des irrigants sur les eaux souterraines du sud-Vendée étant acté par le Conseil général, celui-ci privilégie les eaux des barrages artificiels pour garantir l'essentiel de l'alimentation en eau potable du département. L'affectation de fait des eaux souterraines à l'irrigation agricole, et des eaux superficielles à l'alimentation en eau potable, fragilise le système et implique une vigilance renforcée sur la consommation.

La dramatisation chronique de la situation a une valeur pédagogique que l'on ne peut nier et à laquelle nous pourrions adhérer si elle n'était pas instrumentalisée pour justifier un nouveau barrage, dont l'on peut faire l'économie en repensant l'ensemble du dispositif.

L'eau est un bien commun. Il faut abandonner la vieille pratique de sa co-gestion avec la seule représentation du syndicat majoritaire agricole.

Laisser une petite catégorie d'usagers (les irrigants) s'approprier cette ressource, revient à considérer que les intérêts de la vie aquatique comme ceux de l'eau potable ne sont que subalternes.

Des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) suffisamment ambitieux sur ce thème sont essentiels pour garantir le long terme .

Une vraie concertation, équilibrée dans sa représentation, avant chaque période estivale est essentielle pour préparer la gestion de court terme , fondée sur la solidarité de tous les usages de l'eau à l'échelle de chaque bassin de rivière, au-delà des frontières administratives quand il le faut.

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(1) Co-gestion concrétisée par un « protocole de gestion des nappes du sud-Vendée », qui a eu son intérêt à l'époque de sa mise en place, car alors plutôt novateur, mais qui ne répond plus aux enjeux aujourd'hui prioritaires.


17/06/2010

Fin de partie dans le Marais Poitevin.
L'État est face à ses responsabilités et doit fait prévaloir l'intérêt général.

Le Gouvernement vient d'officialiser l'échec de la démarche engagée en 2002 pour « labelliser » le Marais Poitevin en Parc naturel régional. Cette issue est hélas tout sauf surprenante : il y a un an presque jour pour jour, le 11 juin 2009, la Coordination pour la défense du Marais Poitevin alertait l'opinion lors d'une conférence de presse, en indiquant les raisons pour lesquelles « le Marais poitevin ne sera pas un PNR » : une charte qui ne recueille pas un véritable consensus des acteurs locaux ; un périmètre décousu par les délibérations de rejet de plusieurs communes, et aussi de deux intercommunalités ; un Conseil général de la Vendée qui soutient les producteurs intensifs et met en œuvre une politique environnementale antinomique de celle des PNR (1).

Cet échec est aussi celui du Plan gouvernemental d'action pour le Marais Poitevin, et il ne saurait être compensé par l'octroi du label Grand Site de France. Outre le fait que celui-ci ne concerne qu'une petite partie du territoire, il n'accorde aucune des compétences que la loi reconnaît aux PNR, il ne comporte aucun des leviers que leur donne une charte approuvée (2).

C'est pourquoi nous en appelions alors à l'État, en lui demandant de reprendre la main sur la situation de plus en plus inextricable dans laquelle est plongé le Marais Poitevin, otage de querelles politiciennes fort éloignées de problèmes à résoudre. 

En octobre 2009, lorsque le gouvernement a introduit par voie d'amendement au projet de loi ‘Grenelle 2' un article additionnel visant à la création d'un ‘établissement public administratif de l'Etat pour la gestion de l'eau et de la biodiversité du Marais Poitevin', la Coordination s'est félicitée de cette proposition novatrice ; tout en soulevant, au-delà du concert de louanges issues de tous bords, des questions dont l'acuité ne peut être démentie (3) :

- Comment s'établiront les rapports de force au sein du conseil d'administration de l'établissement public, lequel devra prendre des décisions courageuses ? Quelle sera la place faite aux associations de protection de la nature et de l'environnement ?

- Mêmes questions pour les deux commissions (commission consultative de gestion des niveaux d'eau, commission spéciale irrigation) qui seront des pivots essentiels du fonctionnement de l'établissement ?

- Quelle articulation avec les structures pré-existantes : Institution interdépartementale du Bassin de la Sèvre Niortaise, Syndicat mixte du Parc interrégional du Marais Poitevin, etc. ?

Ajoutons que le Syndicat mixte du Parc interrégional abrite des équipes techniques de haute qualité. Leur expérience et leur dévouement sont indiscutables. Il serait scandaleux que celles-ci fassent les frais de l'opération. Le territoire a besoin de toutes les compétences accumulées.

À l'heure où les décrets d'application répondant à ces questions sont à la rédaction, nous ne pouvons qu'en appeler au sens de l'intérêt général des services de l'Etat pour que la gouvernance de cet établissement public soit équilibrée. Car on ne sortira pas d'une situation de crise qui n'a que trop duré en confortant le pouvoir de quelques élus se faisant le relais des intérêts catégoriels d'une agriculture intensive obnubilée par la création de « bassines », et grignotant subrepticement le marais en poursuivant drainages ou retournements de prairies. 

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(1) http://marais-poitevin.org/html/COM09.htm#110609
(2) http://marais-poitevin.org/html/COM09.htm#061109
(3) http://marais-poitevin.org/Docs/Note_CDMP_EPA


04/06/2010

Gestion de l'eau en Vendée : le verre, qui n'était qu'à moitié-plein,
est en train de se vider !

Communiqué de la Coordination pour la défense du Marais Poitevin,
la Coordination des associations environnementales du littoral vendéen
et la Ligue pour la protection des Oiseaux- Délégation de la Vendée

L'arrêté ‘sécheresse' destiné à encadrer les arrêtés préfectoraux de crise ou de pré-crise avait été ré-écrit de fond en comble pour cette année 2010. Cette évolution était nécessaire pour se mettre en conformité avec la révision du SDAGE du bassin Loire-Bretagne. Les nouvelles dispositions, bien qu'encore très éloignées de ce que demande le bon fonctionnement des milieux aquatiques et zones de marais, présentaient cependant des nouveautés significatives :

Ainsi, les périmètres des zones de gestion dans lesquelles s'appliquent les mesures de limitation des prélèvements d'eau ont été redessinés. Cependant, les eaux de surface du Sud-Vendée sont toujours gérées indépendamment des eaux des nappes qui leur sont pourtant connectées. Dans les départements voisins des Deux-Sèvres et de la Charente-Maritime, la gestion simultanée de l'ensemble de la ressource, qu'elle soit de surface ou souterraine, est acquise depuis longtemps. Sur ce point, donc, la Vendée doit encore évoluer.

Mais la grande affaire de cette année 2010 porte sur les volumes autorisés (les « quotas » d'irrigation) et leur taux de diminution. La démarche doit permettre d'atteindre graduellement l'objectif du SDAGE, objectif lui-même fixé au terme du lobbying considérable des tenants du maintien à un haut niveau des prélèvements de l'irrigation intensive.

Qu'en est-il exactement ?

Il convient de rappeler tout d'abord que les mesures de gestion reposent sur la combinaison de plusieurs paramètres :

- des attributions de quotas volumétriques ;

- et d'autre part des seuils déterminant des décisions croissantes de vigilance, de limitation, ou d'interdiction des usages de l'eau, seuils fixés en termes de débit pour les eaux de surface, et de niveau piézométrique pour les nappes.

La plupart des niveaux de vigilance sur les rivières ne sont pas modifiés en 2010. On note cependant que le ‘seuil d'interdiction de prélèvement' a été subrepticement abaissé pour le secteur ‘Vendée-Sèvre Niortaise' ! C'est un petit cadeau discret fait en passant aux préleveurs directs dans les cours d'eau du Marais poitevin.

S'agissant des nappes du Sud-Vendée, les niveaux de limitation et de d'interdiction des prélèvements avaient été relevés, tout en restant encore bien loin des valeurs nécessaires à l'alimentation correcte du Marais. Mais après le « siège » de la préfecture organisé par la FDSEA, cette décision devrait être annulée. Pour mémoire, sur le secteur du Lay pris à titre d'exemple, le retour à la disposition de 2009 signifie qu'il faudra attendre que la nappe soit à peu près à 1.70m (1) sous le niveau moyen de la mer pour suspendre les pompages  ! La marge est confortable !

Quant à la réduction des volumes attribués aux irrigants, objet du scandale, il convient d'en mesurer la portée véritable, en comparant le niveau des autorisations avec celui de la consommation réelle, toujours bien moindre. Voyons quelques chiffres :

- Secteur du Lay : volume autorisé en 2010 : 6.9 Mm3 ; consommé en 2007 : environ 5.2 Mm3

- Secteur de la Vendée : volume autorisé en 2010 : 12.1 Mm3 ; consommé en 2007 : environ 9.8 Mm3

Il est donc clair que la réduction annoncée s'inscrit dans une dynamique progressive, mais encore trop lente pour diminuer concrètement cette année les prélèvements réels . Elle n'avait somme toute qu'un caractère théorique, et bien du chemin reste encore à parcourir avant d'en arriver à un niveau de consommation de la ressource compatible avec la préservation des milieux naturels aquatiques ! Cet objectif devra pourtant être atteint dans les délais prescrits. C'est inéluctable.

À force de pressions sur l'administration et de déclarations sans fondement, les représentants des irrigants empêchent, depuis désormais de longues années, tout progrès significatif dans la gestion de la ressource. Or, s'ils pensent, aujourd'hui, avoir gagné, ce n'est sûrement pas en crédibilité ! Et la mise en scène actuelle, qui relève du « deux pas en avant, un pas en arrière », n'a finalement pas de sens : elle vise à reculer l'échéance, elle ne permet évidemment pas de s'en défaire. Plutôt que d'anticiper sur des évolutions inéluctables, les irrigants se réjouissent donc d'une victoire à la Pyrrhus !

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(1) Soit à la cote –1.35 m NGF : référence des cotes des cartes IGN.


01/02/2010

Schémas d'aménagement et de gestion des eaux du Marais Poitevin :
un parcours du combattant.

Les trois Schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) du Marais poitevin ont été validés par le Comité de Bassin… sous réserve de nouveaux ajustements.

En dépit des enjeux partagés sur l'ensemble de ce territoire, tant sur le plan de la gestion quantitative que sur celui de la qualité des eaux, et malgré l'exutoire commun des différents cours d'eau dans la baie de l'Aiguillon et dans le Pertuis Breton, la décision avait été prise en 1997 de scinder le bassin versant du Marais Poitevin en trois SAGE, pour satisfaire des revendications territoriales essentiellement vendéennes. Dans sa sagesse, le Comité de Bassin Loire-Bretagne a donc imposé que ces trois SAGE, documents de planification de la gestion des eaux arrêtés pour une durée de six ans, soient élaborés dans une démarche coordonnée. C'est ainsi que les services de l'État ont dû mettre en place une commission afin de garantir cette cohérence. Or, cette cohérence n'est toujours pas acquise…

Après plus de dix années de concertation…

Il a fallu plus de dix ans de procédures et de discussions aux différents acteurs de ce territoire, regroupés dans trois commissions locales de l'eau - CLE (1) - pour élaborer leurs schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Le 16 janvier 2008, le SAGE « Sèvre Niortaise - Marais Poitevin » était adopté par sa CLE. Puis, en février 2008, ce fut le SAGE « Lay ». Mais l'adoption du SAGE « Vendée », alors aussi sur le point d'aboutir, fut retardée en raison d'une manifestation virulente des chambres d'agriculture et d'élus de la majorité du Conseil Général de la Vendée, manifestation qui empêcha la réunion de validation de se tenir. De fil en aiguille et après le renouvellement du collège des élus à la suite des élections municipales de mars 2008, cette coalition d'intérêts, ayant pris en main le bureau de la commission locale de l'eau, a réécrit certaines dispositions du projet de ce SAGE « Vendée », en s'écartant sensiblement, dans la définition de ses objectifs, de ceux du SAGE « Sèvre Niortaise - Marais Poitevin ». La manœuvre a aussi permis de retarder l'ensemble de la procédure de plus d'un an, puisque le texte issu de cette réécriture a été adopté par la CLE le 19 mars 2009.

Parallèlement, l'élaboration du Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du bassin Loire-Bretagne avançait et aboutissait à son approbation à la fin de l'année 2009. Ce SDAGE, élaboré à une échelle plus large, impose dorénavant à ses déclinaisons locales que sont les SAGE les prescriptions minimales pour que d'ici 2015 près des deux tiers des eaux de Loire-Bretagne retrouvent un bon état écologique.

Le résultat de cet imbroglio de calendrier fait que le SAGE « Vendée » a été validé dans une version incompatible avec le SDAGE ; que le SAGE « Lay », d'emblée écrit sous la dictée scrupuleuse des intérêts agricoles, est lui aussi incompatible avec le SDAGE (avec cependant, l'excuse de l'antériorité). Au final, seul le SAGE « Sèvre Niortaise - Marais Poitevin » s'avère compatible avec les dispositions du SDAGE, qu'il avait anticipées, allant même au-delà de quelques-unes d'entre elles et se montrant ainsi plus favorable à une reconquête du bon état des eaux, notamment souterraines (2).

C'est à cette situation que le Comité de Bassin devait faire face, les services de l'État et la commission de coordination des trois SAGE lui proposant d'adopter l'ensemble de ces documents, sous réserve d'une mise en compatibilité des dispositions des SAGE « Lay » et « Vendée » avec le SDAGE.

Toujours animées par le souci de s'inscrire dans une dynamique constructive, les associations de protection de la nature et de l'environnement siégeant au Comité de Bassin, auxquelles se sont joints les représentants des associations de pêcheurs et de consommateurs, se sont déclarées favorables au SAGE « Sèvre Niortaise-Marais Poitevin » ; et leurs représentants se sont abstenus sur les deux autres, dont une ré-écriture compatible avec le SDAGE devra être soumise à nouveau à l'avis du Comité de Bassin.

… le « parcours du combattant » n'est pas achevé.

Encore une fois, le calendrier électoral actuel va venir perturber le processus d'avancement de la procédure : le collège des élus des CLE devra être modifié après les élections régionales de mars 2010, et plusieurs mois s'écouleront donc avant que les préfets ne puissent arrêter ces textes... Il est certain – cela a été pratiquement annoncé en séance ce 26 janvier –, que les représentants de l'agriculture intensive, qui a déjà pillé la ressource en eau du bassin et qui œuvre pour une gestion de l'eau à minima dans le Marais, utiliseront ce délai supplémentaire pour « en faire rabattre » au SAGE « Sèvre Niortaise-Marais Poitevin » jugé par eux « trop ambitieux ». Autrement dit, ils mettront tout en œuvre pour atteindre la cohérence par le bas, en minimisant les objectifs et les programmes de mesures…

C'est pourquoi nous appelons les décideurs, élus et administrations, investis d'une mission de défense de l'intérêt général, à ne pas céder aux habituels chantages. Il leur appartient de tenir bon la barre afin que le cap ne soit pas éternellement dévié. Il est en effet urgent que de nouvelles voies d'action puissent enfin être entrevues.

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(1) La commission locale de l'eau (CLE) est l'organe politique de concertation qui assure la préparation et la mise en oeuvre du SAGE. Elle représente les divers acteurs du territoire, en 3 collèges : 1) le collège des représentants des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics locaux ; 2) le collège des usagers, des propriétaires fonciers, des organisations professionnelles et des associations concernées ; 3) le collège des représentants de l'Etat et de ses établissements publics.

(2) L'exception maraîchine : le SDAGE du bassin Loire-Bretagne affiche partout des objectifs de bon état quantitatif à atteindre en 2015 sauf pour les nappes aquifères alimentant le Marais poitevin ; alors qu'aucune contrainte technique ne peut justifier cette dérogation.


12/01/2010

« Bassines » autour du Marais poitevin :
encore des copies à revoir.

 

Par deux décisions rendues le 31 décembre 2009, le tribunal administratif de Poitiers a annulé deux arrêtés du préfet de la Charente-Maritime autorisant la réalisation de deux réserves de substitution à Benon et Ferrières (environ 300 000 m3, dans la Plaine d'Aunis) et de cinq autres réserves dans le bassin du Mignon (environ 1,5 Mm3).

Après l'annulation par le tribunal administratif de Nantes, en novembre 2008, du projet de dix retenues de substitution dans le bassin des Autises, le tribunal administratif de Poitiers vient donc de conclure dans le même sens pour deux autres dossiers, faisant droit aux requêtes des associations Nature Environnement 17 et AIE 17.

Dans le bassin des Autises, les maîtres d'ouvrage et l'administration ont été contraints de reconsidérer leur projet, tentant ainsi de le rendre plus conforme à la réglementation. Il en sera de même en Charente-Maritime, à moins que les promoteurs de ces retenues ne s'orientent vers une aventureuse procédure d'appel.

Encore une fois, nous assistons au résultat que donne une déplorable façon d'instruire les dossiers, héritée de plusieurs décennies de mauvaises pratiques. La gestion de l'eau, en particulier la gestion des prélèvements estivaux, a été trop longtemps confisquée par les partisans des conceptions les plus intensives de la profession agricole. Il s'en est suivi des réflexes d'action en « terrain conquis », en considérant les projets comme acquis a priori  ; en bâclant leur conception et en faisant des services instructeurs de l'administration de simples chambres d'enregistrement. Avec un chantage à « l'économie » s'exerçant à plus haut niveau comme seule réponse aux difficultés rencontrées et aux interrogations émises..

L'ensemble des usagers de la ressource en eau, pourtant reconnue comme un bien commun, est ignoré, voire même méprisé comme sur le bassin vendéen des Autises, où le nouvel arrêté de régularisation, retouché dans sa forme, reproduit à l'identique les conditions techniques d'exploitation des ouvrages et les méthodes de gouvernance, pourtant critiquées par tous.

Ces jugements des tribunaux devraient être l'occasion de permettre de ramener chacun à une réalité plus démocratique.

Ceci d'autant plus que la Coordination pour la Défense du Marais Poitevin n'a jamais fermé la porte au dialogue. Mais il faut que celui-ci soit franc et loyal. En effet, nous voyons bien qu'après tant d'années de laisser-faire, l'effort à fournir est considérable. On sait maintenant qu'une réduction globale des 2/3, parfois des ¾, des prélèvements est impérative : toute autre évaluation minimisant la situation ne saurait relever que d'un objectif intermédiaire.

Ainsi, compte tenu de son coût collectif et de ses impacts environnementaux non négligeables, la solution des retenues de substitution n'est envisageable que dans un contexte où les solutions alternatives les plus soutenables sont envisagées et mises en œuvre en priorité. Cela passe, en particulier, par un vrai engagement, dénué d'arrière-pensées, dans des pratiques agricoles différentes, plus respectueuses de la ressource en eau, et ceci pas seulement dans les bassins d'alimentation des captages pour l'eau potable.

Est-ce demain la veille ?


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