Le Marais Poitevin, un espace en crise |
Communiqués de presse de la Coordination pour la défense du Marais Poitevin
L’épilogue rocambolesque d’un moratoire ambigu.
Le 11 octobre 2013, Philippe Martin, ministre de l’Ecologie a adressé un courrier aux directeurs des agences de l’eau pour leur préciser sa position sur la question controversée des stockages d’eau.
Le ministre constate que le seul stockage en vue d’une utilisation pour l’irrigation ne suffit pas à « répondre aux enjeux d’une gestion durable de la ressource en eau ». Trop souvent, reconnaît-il, on ne fait « que déplacer dans le temps et sur le territoire les problèmes rencontrés ».
Appelant à une gestion de la ressource organisée dans le cadre de projets concertés localement, en visant non plus seulement la sécurisation des prélèvements agricoles, mais aussi l’engagement dans des pratiques agricoles moins consommatrices d’eau, il annonce qu’un travail complémentaire reste à conduire pour préciser les contours des projets de retenues susceptibles de recevoir le soutien de l’État et des agences de l’eau.
Un point de vue somme toute raisonnable, se situant bien dans la logique des précédentes interventions ministérielles sur le sujet…
Une conclusion quand même surprenante
Le ministre conclut cependant son courrier en autorisant, dans une démarche visiblement dérogatoire à ce qui précède, que les projets « bien engagés (…) s’inscrivant dans une démarche territoriale de progrès » bénéficient sans plus attendre des subventions des agences ainsi que des financements européens appelés à s’éteindre à la fin de 2013.
Pour autant, il ne précise pas quels sont les projets concernés par ce blanc-seing.
Un heureux concours de circonstance ?
L’explication pourrait être venue quatre jours plus tard à l’occasion d’une réunion du conseil d’administration de l’Établissement public du Marais Poitevin, sollicité pour approuver deux demandes de financement portant sur trois retenues projetées sur la bordure vendéenne du Marais Poitevin ; des dossiers présentés comme répondant aux attentes ministérielles, et soumis dès le 24 octobre au conseil d’administration de l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne.
On voit donc que l’essentiel du courrier du ministre semble résider dans sa conclusion bien plus que dans son argumentaire : il y avait urgence à dégager la voie pour s’assurer que les dossiers vendéens en instance soient financés dans les meilleures conditions possibles !
Une politique à contre sens !
Il est plutôt rocambolesque d’annoncer dans un même mouvement qu’un groupe de travail va plancher sur les conditions dans lesquelles ces ouvrages pourraient bénéficier de fonds publics (jusqu’à 80% des investissements !), et d’en anticiper les conclusions en considérant a priori que des dossiers préexistants méritent d’être financés sans plus de questions… C’est là un très mauvais signal adressé à tous ceux qui défendent une gestion équilibrée de la ressource en eau ! En tous cas, cet épisode a été bien apprécié par les tenants de l’irrigation intensive et le système agro-industriel associé.
La Commission « Mobilité 21 » vient de rendre son rapport sur le projet de Schéma national des infrastructures de transport (SNIT), en attente d'approbation… depuis 2009. En cause, un empilement de nombreux projets de liaisons ferroviaires, routières et fluviales, d'opérations d'intervention sur les réseaux existants, sans réelle vision stratégique de la politique des transports à mettre en œuvre à moyen et long terme ; et le caractère irréaliste du montant total des investissements prévisionnels : 245 milliards d'euros…
La Commission devait donc examiner « la pertinence, l'intérêt et l'urgence des opérations » inscrites au projet de SNIT, en s'affranchissant d'une approche jusque là centrée sur les infrastructures pour s'intéresser aux besoins de la population en termes de « transports du quotidien ». Une vraie révolution copernicienne !
Nous apprenons ainsi que la Commission ne retient le projet d'autoroute A831 (Fontenay-le-Comte / Rochefort) dans aucun de ses deux scénarios, estimant qu'il ne répond pas aux critères environnementaux et sociétaux qui doivent fonder une politique raisonnée des transports.
Nos associations s'en félicitent évidemment ; elles n'en sont nullement surprises pour autant : depuis le lancement des premières études, en 1997, elles n'ont cessé d'exprimer ce que dit aujourd'hui la Commission Mobilité 21 ; elles n'ont cessé de dénoncer la gabegie financière à laquelle conduirait la réalisation de ces 64 km d'autoroute ; elles n'ont cessé d'alerter sur les impacts irrémédiables que causerait un tel projet sur les deux grandes zones humides qu'il traverserait (marais Poitevin et de Rochefort, tout deux sites Natura 2000).
Ce sont aujourd'hui de nouvelles orientations qu'il faut dessiner pour la politique des transports, à tous les niveaux pertinents (du local au national), et en cohérence avec les principes qui ont conduit le travail de la Commission à la demande du Gouvernement. Multimodalité des transports, transition écologique et énergétique doivent impérativement être pris en compte dans la définition des objectifs de l'aménagement du territoire et la programmation des infrastructures.
Plus largement, c'est aussi la façon dont sont instruites les déclarations d'utilité publique qui doit être profondément modifiée. Celles-ci, privilégiant une approche comptable, sous-estiment trop souvent la dimension environnementale, et conduisent de ce fait à consacrer des décisions d'aménagement en réalité contradictoires avec l'intérêt général.
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Le coût estimatif est passé de 560 M€ en janvier 2004 à 650 M€ en janvier 2011, puis à 890 M€ en octobre 2011, soit 14 M€ du km.