Communiqués de presse de
la Coordination pour la défense du Marais Poitevin - 1998
22.12.1998
Rapport Simon : la Coordination confortée dans ses analyses et ses propositions
La Coordination pour la
défense du Marais Poitevin a pris connaissance avec un grand
intérêt du rapport de M. Gilbert Simon,
rédigé à la demande de Mme Dominique Voynet,
ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement.
Ce document conforte
l’association dans ses propres analyses et propositions :
Le Marais continue de
se
dégrader et
les grandes cultures gagnent toujours du terrain. On apprend ainsi que
3 600 hectares de prairies auraient encore été
labourés
entre 1992 et 1997.
Les actuelles *mesures agri-environnementales (OGAF, OLAE) ne sont pas suffisantes et il n’y aura pas d’inversion du
processus de dégradation sans un rééquilibrage
significatif des aides en faveur de l’élevage extensif.
Le budget
nécessaire à ce soutien de l’élevage extensif maraîchin est
évalué à 50 MF/an, soit 30MF
supplémentaires
par rapport à la situation actuelle. Ce
chiffre peut aisément être comparé aux sommes
autrement
plus considérables consacrées au soutien à
l’irrigation
et au maïs.
Le rapport Simon montre avec
clarté la voie dans laquelle il convient désormais de
s’engager :
C’est bien sur le «
paysage
réglementaire et financier dans lequel les exploitants auront
à
faire des choix de spéculations agricoles » qu’il
faut avant tout faire porter les efforts.
Les exploitants ont
besoin de garanties à la fois quant au montant des
aides et quant à la pérennité du système
à mettre en place, au delà des habituels contrats
à 5 ans.
L’outil de l’écoconditionnalité,
qui consiste à ne pas aider tout et son contraire mais à
privilégier les « bonnes pratiques », doit
être systématisé pour obtenir une meilleure
utilisation des fonds publics.
Les
prélèvements d’eau doivent être
drastiquement réduits à l’échelle de tout le
bassin versant, de façon à garder disponibles les volumes
qui permettront de conserver au Marais son caractère de zone
humide.
Sur ce point, l’écoconditionnalité doit
conduire
à prendre en compte les indicateurs naturels que sont
l’état
des cours d’eau et des résurgences. Il n’est pas
tolérable
que chaque année, il faille systématiquement aller au
tarissement
avant de commencer à seulement réduire les
prélèvements.
La mise en place des
contrats
territoriaux d’exploitation (C.T.E.) issus de la Loi
d’orientation
agricole peut s’avérer pertinente si, à cette occasion,
les
moyens sont dégagés d’un traitement particulier d’une
zone
écologiquement sensible comme le Marais Poitevin :
cahier des charges-type spécial zone
humide
aides spécifiques et moyens
budgétaires à
hauteur de l’enjeu pour l’ensemble du territoire marais.
Dans l’état actuel des prévisions, le
plafonnement des C.T.E. à 50 000 F/exploitation, et la
disparition annoncée des mesures agri-environnementales ne
peuvent conduire qu’à la catastrophe !
Selon les termes de sa lettre de commande, la
ministre de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement
attendait du rapport Simon « un
programme d’actions à court, moyen et long terme destiné
à arrêter l’érosion des dernières zones
d’intérêt écologique et paysager majeur, puis
à rétablir les grands équilibres dans l’ensemble
des marais ».
Pour la première fois sans
doute, un rapport officiel consacré au Marais Poitevin analyse
de manière indiscutable les axes majeurs de l’action -
l’agriculture et l’eau -, tout en ouvrant la réflexion sur des
moyens somme toute simples d’infléchir un processus qui a
longtemps pu sembler inexorable.
Le chemin est désormais
tracé. Il convient de s’y engager avec détermination et
de ne plus s’en écarter.
5.05.1998
MARAIS
POITEVIN : La France est
traduite devant la Cour de Justice
européenne
Par un acte daté du 3 avril 1998, la
Commission
Européenne a saisi la Cour de Justice (C.J.C.E.) du dossier du
Marais
Poitevin, faisant droit à une plainte déposée par
la Coordination pour la défense du Marais Poitevin en 1989.
Suite à l'enregistrement de cette
plainte, une procédure d'infraction
avait été
engagée, une lettre de mise en
demeure étant adressée
aux autorités françaises en décembre 1992. Dans ce
document, la Commission pointait "
les travaux de drainage, d'assèchement et de mise en culture
entrepris dans le Marais Poitevin ayant conduit à une
très importante dégradation de cette zone humide d'un
intérêt exceptionnel pour l'avifaune européenne ", reconnaissant par le fait le bien
fondé des griefs de la Coordination. La France était
alors appelée à présenter ses observations.
Devant l'absence de réactions
significatives de l'État, un avis motivé
avait suivi en novembre 1995, précisant les raisons de fait et de droit qui
conduisaient la Commission à qualifier la situation du Marais
Poitevin de manquement au droit communautaire.
Durant cette phase pré-contentieuse, dont on
notera
qu'elle s'est étalée sur une période
particulièrement
longue (près de 9 années, de fin 1989 au début de
1998), les autorités françaises
ont eu toute latitude pour prendre les dispositions propres à faire
cesser le manquement au droit communautaire qui
leur était reproché, et obtenir ainsi l'abandon de la
procédure.
Malheureusement, la
Commission n'a pu que prendre acte de l'insuffisance des
réponses apportées par les gouvernements successifs. Devant le non respect persistant d'obligations
découlant de la directive CEE 79/409 du 2 avril 1979 sur la
conservation des oiseaux sauvages, et constatant
que la France n'a, à aucun moment, fait la preuve de sa
volonté sérieuse d'empêcher la
détérioration du Marais Poitevin, la Commission vient donc de décider d'ouvrir
la phase contentieuse de la procédure en saisissant la Cour de
Justice.
La perspective d'une condamnation de
notre pays en raison de sa mauvaise gestion du Marais Poitevin est
aujourd'hui plus proche que jamais. Il appartient donc à
l'État d'agir au plus vite et de prendre enfin toutes les
mesures nécessaires pour redresser une situation qui n'a
cessé de se dégrader sur tous les plans : disparition des
prairies naturelles humides, assèchement général
du marais, appauvrissement de la diversité biologique.
Pour sa part, la Coordination pour la
défense
du Marais Poitevin entend bien rester mobilisée et
particulièrement
vigilante sur les suites de ce dossier, comme l'y invite d'ailleurs la
Commission elle-même.
25.02.1998
Autoroute A 831 : les
associations ADRA 831, Vivre Bien en Aunis, et la Coordination pour la
défense du Marais Poitevin ont été reçues
au Cabinet de M. Gayssot, ministre de l'Equipement
Une délégation composée de
membres
d'ADRA 831, de
la Coordination pour la défense
du Marais Poitevin et de
Vivre Bien en Aunis a
été
reçue au cabinet de M. GAYSSOT, ministre de l'Équipement,
le lundi 23 février 1998. Au cours de cet entretien
particulièrement
constructif, les 3 associations ont renouvelé leurs observations
sur le projet d'autoroute A-831 Fontenay-le-Comte / Rochefort :
La consultation du public et des
collectivités territoriales
a été conduite sans qu'aient été
respectées
les dispositions de la circulaire du 15/12/1992 relative à
la concertation préalable que demandent tous les grands projets
d'infrastructures.
C'est ainsi que les grandes
fonctions du projet n'ont pas pu être discutées, non plus que ses enjeux économiques, sociaux ou
environnementaux. Sur tous ces
points, des divergences ne manquent cependant pas de s'exprimer.
Les études de tracé ont
été
conduites sans qu'un cahier des charges
ait pu être élaboré, discuté, publié.
D'éventuelles solutions
alternatives
ont été ignorées, sans la moindre étude
préalable.
Concernant les 3objectifs assignés au projet, les éléments suivants
ressortent
tant du dossier que de l'examen du contexte général et
local
:
1. A l'échelle nationale et
européenne :
La constitution d'un
grand
axe de
transit Nord-Sud (la Route des
Estuaires, "liaison longitudinale rapide " entre
l'Europe du
Nord et
la Péninsule Ibérique) connaîtra une étape
décisive
avec la mise en service du dernier tronçon de l'A83,
dont l'ouverture est annoncée pour l'an 2001.
2. A l'échelle
régionale et locale :
Le
désenclavement
de La Rochelle
et du littoral Nord de la Charente-Maritime est assuré par l'achèvement des aménagements de la R.N. 11, avec mise aux normes autoroutières, dans le cadre du contrat de
plan 1994-98 (autoroute non condédée A
810, en liaison effective avec l'A
10, prolongée après
Paris
par l'A 1).
L'amélioration
des
échanges
entre la Vendée et la Charente-Maritime passe par la résorption du point noir de Marans,
sur la R.N. 137, ce
que ne pourra assurer la réalisation d'une liaison à
caractère
autoroutier, c'est à dire relativement étanche, et grevée d'un péage.
D'une manière
générale,
les études de trafic confirment
la faible attractivité de l'option offerte par le projet de l'A
831 ; à terme, la connexion de
l'A 83 avec
l'A 10 renforcera
la concurrence entre cette dernière et l'A
831, au détriment d'une
rentabilité
de toute façon non assurée, dans le contexte de moindre
croissance
du trafic observé depuis 1990.
Enfin, il apparaît désormais clairement
que la
question clé du financement doit être posée en des
termes entièrement nouveaux :
Jusqu'à présent, le système
français
des autoroutes concédées à péage a
consisté
à financer des réalisations nouvelles, souvent
déficitaires,
par les bénéfices de tronçons excédentaires
déjà amortis.
Or, de nouvelles règles liées au
respect
de la concurrence rendent caduc ce système qui
privilégiait
trop ouvertement les concessionnaires en activité, malgré
leur surendettement chronique et déraisonnable.
Il faut aujourd'hui tenir compte
d'une réalité simple mais incontournable, que vient
également de confirmer Mme Voynet, en charge de
l'Aménagement du Territoire :
Dans le cas de l'A 831,
le
faible trafic attendu en fera une autoroute
non rentable. Il ne sert à rien de manipuler les chiffres : le
trafic moyen annoncé à hauteur de 16 000
véhicules/jour,
vraisemblablement surestimé, reste
en tout état de cause insuffisant. Il sera donc
impossible
de recourir au système de la concession sans une forte
subvention
d'argent public pour compenser le déficit.
Ce fait capital semble avoir échappé
à
la vigilance de tous ceux qui réclament l'inscription de cette
autoroute
au schéma directeur routier, en pensant ou en faisant croire que
cela ne coûtera rien au contribuable.
L'erreur que représente
cette conception d'une autoroute réalisable sans financement
public est aujourd'hui une évidence. Persister dans cette voie
sans issue relèverait désormais d'une attitude purement
démagogique, et serait faire preuve d'une
irresponsabilité lourde de conséquences futures.
Les 3 associations resteront donc
particulièrement vigilantes devant les prises de position des
différents acteurs concernés par ce projet.
- Adra 831 -
- Coordination pour la défense du Marais Poitevin -
- Vivre bien en Aunis -
12.02.1998 :
Réexaminer en
profondeur la situation du Marais Poitevin dans son ensemble
La Coordination pour la Défense du Marais
Poitevin
se réjouit de voir le ministre de l'Aménagement du
territoire
et de l'Environnement se saisir enfin du dossier du Marais Poitevin, si
mal traité par son prédecesseur.
Le prétendu label " Grand site naturel "
n'était
en effet qu'un faux semblant de plus, destiné à masquer
l'échec
des pouvoirs locaux et le manque de sincérité de leurs
proclamations
soi-disant " protectrices ".
La supercherie médiatique sur laquelle repose
le
" plan d'actions " concocté en décembre 1996 par
Jean-Pierre
Raffarin et Corinne Lepage est aujourd'hui démasquée. Il
convient désormais d'aller plus loin et de réexaminer en
profondeur la situation du Marais Poitevin dans son ensemble,
sans céder à la vieille logique de l'émiettement
du
territoire et des traitements séparés, qui
perpétue,
voire renforce les effets néfastes des divisions
politico-administratives.
En évoquant la protection
réglementaire
de la Venise Verte, le ministre fait allusion au projet actuel
d'extension
du site classé, qui devrait effectivement empêcher la
délivrance
d'un permis de construire pour des réalisations telles qu'une
ligne
à haute-tension. Il n'en reste pas
moins
que ce classement de site ne concernera qu'une petite partie du Marais
Poitevin. Et surtout, il s'agit d'une mesure tout à fait
impropre
à la gestion active du milieu. On ne peut donc pas
considérer
ce classement comme une réponse susceptible d'enrayer le
développement
des pratiques agricoles destructrices qui atteignent aujourd'hui cette
zone.
La Coordination pour la Défense du Marais
Poitevin
rappelle ses propositions récemment présentées,
qui
identifient les principaux axes de travail
et les décisions
concrètes et urgentes qui
permettraient
d'apporter des réponses adéquates aux enjeux actuels du
Marais
Poitevin :
SE FIXER UN OBJECTIF
PRIORITAIRE de préservation et
de
restauration,
et redonner à la population la fierté d'habiter et de
vivre
dans un pays original, riche d'histoire et de potentialités,
dans
le respect de ses caractéristiques essentielles :
Notification dans les
meilleurs délais de l'ensemble Marais Poitevin et Baie de
l'Aiguillon comme site Ramsar, avec inscription au Registre de Montreux
(en application de la Convention internationale sur les zones humides).
" Le Registre de Montreux est le principal
instrument
de la Convention permettant de mettre en évidence les sites
où
un changement défavorable s'est produit, est en train ou
susceptible
de se produire dans les caractéristiques écologiques et
où
des mesures de conservation prioritaires sont donc nécessaires.
Le Registre est géré dans le cadre de la Banque de
données
Ramsar et mis à jour en permanence. "
[Principes opérationnels du Registre de
Montreux
- Résolution VI.1, Brisbane 1996, Annexe, 3]
SE DONNER TOUS LES
MOYENS de
protéger les éléments du patrimoine
maraîchin
qui subsistent :
Réalisation de
l'objectif " zéro perte nette " :
Désignation comme Zones de Protection
Spéciale
(Z.P.S.) de la totalité des prairies naturelles restantes,
accompagnée
d'un contenu protecteur de type réglementaire interdisant la
destruction
et le labour (le plus souvent : arrêté préfectoral
de biotope) ;
Correction des aberrations des
délimitations précédentes
(Z.P.S., Loi Littoral).
Compte tenu du contexte actuel,
des dispositions à caractère réglementaire doivent
impérativement venir en appui des opérations
agri-environnementales, qui s'avèrent insuffisantes pour enrayer
à elles seules la dégradation (il s'agit en effet
d'opérations facultatives, temporaires, non compétitives
par rapport à la mise en culture).
CESSER SANS
AMBIGUITE de
soutenir toutes les pratiques agricoles inadaptées :
L'eau représente incontestablement
l'élément
clé, et les pratiques agricoles peuvent et doivent
s'apprécier
en fonction de leurs effets sur les milieux aquatiques et sur la
ressource.
Renforcement des mesures
de préservation de la ressource en eau :
Au niveau du grand bassin versant :
mesures de limitation de l'irrigation et
de
protection des
nappes aquifères
arrêt des
créations/régularisations des
points de prélèvement
encadrement en durée de la saison
d'irrigation
renforcement des protocoles de gestion
avec
prise en compte
des indicateurs d'affaiblissement de la ressource
refus des expédients de type
barrages
et retenues
collinaires relevant de la simple fuite en avant
mise en place de soutiens aux cultures
les
plus économes
de la ressource
mesures de
réhabilitation/protection
des hydrosystèmes
souterrains : favoriser l'infiltration, limiter le ruissellement) ;
Mise en place prioritaire
de mesures de reconquête et de renaturation des couloirs
d'inondation (lit mineur et majeur) et axes hydrauliques.
SOUTENIR AU CONTRAIRE
EN
PRIORITE les pratiques agricoles compatibles avec la
préservation
de l'environnement et du patrimoine maraîchin :
L'indispensable rééquilibrage des aides
aux productions agricoles doit prendre en compte leurs effets sur
l'environnement
; favoriser l'élevage extensif dans le marais et les cultures
économes
en eau à l'échelle du bassin versant.
EN FINIR SANS
AMBIGUITE avec les projets d'aménagement antinomiques avec la
préservation
du patrimoine naturel du marais :
Réévaluation
des projets d'infrastructures susceptibles d'affecter les zones humides
:
Projet d'autoroute A-831
(Fontenay-le-Comte / Rochefort) :
Retrait de l'accord de la Direction de la
Nature et des Paysages
en date du 14 mars 1997 ;
Lancement d'une véritable
concertation, conforme à
la réglementation, pour permettre l'étude d'alternatives
à partir du réseau routier existant.
Liaison Sainte-Hermine /
La Rochelle (par Moreilles et le Pont du Brault)
Fermeture des " fenêtres "
laissées disponibles
par les Z.P.S. actuelles.
" Route bleue " du
littoral vendéen :
Protection des espaces de haute valeur
biologique actuellement " oubliés " au titre des Z.P.S. et de la Loi Littoral
La nomination par le Gouvernement
d'un chargé de mission de haut niveau hiérarchique, afin
d'assurer, au plus près du terrain, le suivi et la
réalisation des mesures nécessaires à la
sauvegarde et à la réhabilitation du Marais Poitevin, est
indispensable pour couronner le dispositif volontariste dont nous
demandons la mise en place, et pour en garantir la
concrétisation.